Les derviches tourneurs appartiennent à l’ordre soufi Mevlevi, fondé au XIIIᵉ siècle en Turquie par les disciples de Jalâl ad-Dîn Rûmî, poète et mystique persan. Cet ordre mystique s’est développé autour de la recherche de l’extase spirituelle, de la purification de l’âme et de l’union avec le divin. La danse tournante des derviches, connue sous le nom de Sema, est l’expression la plus emblématique de cette quête.
Le Sema n’est pas un simple spectacle mais un véritable rituel initiatique. Les derviches tournent sur eux-mêmes dans un mouvement circulaire qui symbolise le cycle de la vie, de la mort et de la renaissance, ainsi que l’harmonie entre l’homme et l’univers. La main droite, dirigée vers le ciel, reçoit la lumière divine, tandis que la main gauche, tournée vers la terre, la transmet à l’humanité. Ce geste symbolise la circulation de l’énergie spirituelle et l’idée que chaque être humain peut être un vecteur de bonté et de sagesse.
Avant de commencer la danse, les derviches suivent un protocole précis : port de la tenue traditionnelle (tunique blanche, manteau brun appelé hırka et chapeau conique ou sikke), recueillement et écoute des musiques et poèmes mystiques de Rûmî. Le ney, une flûte en roseau, et le kudüm, un petit tambour, accompagnent le rituel, créant un environnement sonore propice à la méditation profonde. Le derviche entre alors dans un état de transe méditative, un état d’extase spirituelle où l’égo s’efface et où l’âme se rapproche de Dieu.
Historiquement, l’ordre des Mevlevi a joué un rôle central dans la culture ottomane : il a contribué à la diffusion de la poésie, de la musique et de la philosophie soufie à travers l’Empire. Bien que la confrérie ait été dissoute au début du XXᵉ siècle à la suite des réformes de la Turquie moderne, les pratiques rituelles continuent à Konya, ville où Rûmî est enterré, et où le festival annuel de la Sema attire des milliers de visiteurs et de fidèles.
Le symbolisme des derviches tourneurs va au-delà de la simple danse : il incarne l’amour universel, la tolérance, la recherche de la paix intérieure et la communion avec le cosmos. Chaque rotation, chaque geste, chaque souffle dans la musique est porteur de sens. En observant les derviches, le spectateur est invité à méditer sur sa propre existence, la fluidité du temps et la transcendance spirituelle.
Ainsi, les derviches tourneurs ne sont pas seulement un patrimoine culturel turc, mais un héritage spirituel universel, qui continue de fasciner par sa profondeur mystique et sa beauté hypnotique.

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire