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4 juin 2025

Culture : Che Guevara, la légende à double tranchant







  Ernesto Guevara naît en 1928 à Rosario, en Argentine, dans une famille aisée et progressiste. Dès l’adolescence, il est frappé par les inégalités sociales, malgré une enfance marquée par l’asthme chronique. Étudiant en médecine, il entreprend à 23 ans un long voyage à moto à travers l’Amérique latine. Cette expédition, racontée dans "Carnets de voyage", est un choc fondateur. Il découvre la pauvreté extrême, les abus des compagnies américaines comme United Fruit, et le racisme institutionnalisé. C’est au Guatemala, en 1954, qu’il voit pour la première fois l’intervention américaine renverser un gouvernement progressiste. Il en ressort convaincu : seule la lutte armée pourra libérer les peuples opprimés.


  En 1955, à Mexico, il rencontre Fidel Castro. Guevara rejoint le petit groupe de révolutionnaires qui prépare l’expédition du Granma. Lorsqu’ils débarquent à Cuba, ils sont traqués, mal équipés, mais Che se distingue vite par son courage et sa discipline. Il devient l’un des principaux commandants de la guérilla dans la Sierra Maestra. Il mène plusieurs batailles décisives, notamment à Santa Clara en décembre 1958, où ses troupes sabotent les rails d’un train blindé envoyé par Batista. Cette victoire précipite la fuite du dictateur. À 31 ans, Guevara est une légende vivante. Il occupe ensuite plusieurs fonctions officielles : directeur de la Banque nationale de Cuba, ministre de l’Industrie, mais son idéalisme s’accorde mal avec la gestion d’un État.


  Refusant le confort du pouvoir, Che quitte Cuba en 1965 pour "semer la révolution" ailleurs. Il tente d’exporter la guérilla au Congo, sans succès : langue, culture, divisions internes, tout joue contre lui. En 1966, il part en Bolivie sous une fausse identité. Son réseau est fragile, et l’armée bolivienne, aidée par la CIA, est sur ses traces. En octobre 1967, trahi, affaibli, blessé, il est capturé dans un village isolé. Le lendemain, il est exécuté sommairement. Selon les témoins, ses derniers mots furent : "Tirez, n’ayez pas peur. Vous ne tuerez qu’un homme."


  Près de 30 ans après son exécution en Bolivie, les restes de Che Guevara sont retrouvés en 1997 dans une fosse commune à Vallegrande, grâce à une équipe médico-légale argentine. Ils sont ensuite rapatriés à Cuba, où un imposant mausolée est inauguré à Santa Clara, la ville symbole de sa plus grande victoire militaire. Le site, sobre et solennel, abrite un musée retraçant sa vie ainsi qu’un mémorial aux combattants tombés avec lui. Sur le mur, une flamme éternelle brûle sous cette inscription : "Hasta la victoria siempre". Chaque année, des milliers de visiteurs s’y rendent pour saluer le révolutionnaire devenu mythe, entre recueillement sincère et culte officiel soigneusement entretenu par le régime cubain.


  Che Guevara fascine. Son visage stylisé, repris sur des T-shirts, devient une icône mondiale. Pourtant, derrière l’image du romantique révolutionnaire se cache un homme intransigeant. Il supervisa les tribunaux révolutionnaires à Cuba, où plusieurs centaines de personnes furent condamnées à mort. Pour ses détracteurs, c’est un dogmatique, militariste, sans pitié. Pour ses admirateurs, c’est l’incarnation du sacrifice total pour un idéal. En Bolivie, ses dernières lettres parlent de solitude, de doutes, mais aussi d’une foi intacte en la révolution. Il écrivait à ses enfants : "Soyez toujours capables de ressentir au plus profond de vous-même n’importe quelle injustice commise contre quiconque, n’importe où dans le monde."



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