Départ de Nice en car... Onze heures et demi de route, des kilomètres de paysages changeants, des aires d’autoroute, quelques cafés pas toujours fameux, mais l’excitation est là : cap sur le sud-ouest, direction Saint-Pée-sur-Nivelle, au cœur du Pays basque français.
Quand on arrive enfin, un peu fatigué mais curieux, l’atmosphère change immédiatement. L’air est plus doux, plus humide aussi, et les collines verdoyantes encadrent les maisons blanches et rouges... Pas de doute, le dépaysement commence ici !
L’installation se fait à l’hôtel Le Trinquet, une adresse familial, simple mais chaleureuse, avec ce charme régional où l’on sent qu’on va bien manger, bien dormir, et peut-être même découvrir ce fameux sport basque dont l’établissement porte le nom. Une petite chapelle à côté, un fronton ou les jeunes s'amusent et s'entrainent à la pelote basque.
Le lendemain matin, après une bonne nuit au Trinquet et un petit-déjeuner simple mais revigorant, direction Espelette, l’un des villages les plus emblématiques du Pays basque. Et à peine arrivé, on comprend pourquoi ! Le rouge vif des piments suspendus aux façades blanches donne à ce lieu une identité visuelle unique, presque théâtrale.
Le village est vivant sans être oppressant, avec ses ruelles pavées, ses échoppes d’artisans, et son atmosphère authentique. On y flâne sans but précis, le nez en l’air, les yeux attirés par chaque détail : un balcon fleuri, une boutique de produits locaux, une façade traditionnelle joliment conservée.
Vers onze heures, c’est une autre facette du village qui s’offre à moi : la découverte d’une exploitation agricole spécialisée dans le piment d’Espelette. Là, le décor change, on quitte un peu les ruelles pour entrer dans l’univers concret et passionnant de cette culture typique.
Les propriétaires, passionnés et fiers de leur savoir-faire, expliquent avec simplicité les différentes étapes de la culture : du semis à la récolte, en passant par le séchage traditionnel des piments, suspendus aux façades ou dans les greniers, comme pour mieux capter le soleil et la chaleur. Cette visite, à la fois didactique et authentique, donne une toute autre saveur à la balade.
Pour finir, la cerise sur le gâteau : la dégustation à l’atelier du piment, la boutique où l’on peut goûter sauces, épices, confitures ou même chocolat au piment. Une explosion de saveurs, parfois piquantes, parfois douces, mais toujours très fines. Une expérience sensorielle parfaite pour garder un souvenir épicé du Pays basque.
Le piment d’Espelette (ou Ezpeletako biperra en basque) est bien plus qu’une simple épice : c’est un véritable symbole culturel et gastronomique du Pays basque. Originaire du Chili, ce petit fruit rouge a été introduit en Europe au XVIᵉ siècle grâce aux explorateurs, avant de s’adapter parfaitement au climat doux et ensoleillé d’Espelette et ses environs. Depuis 2000, il bénéficie d’une Appellation d’Origine Protégée (AOP), garantie de qualité et d’authenticité. Pour obtenir ce label, le piment doit être cultivé dans un périmètre bien défini, selon des méthodes traditionnelles strictes, notamment le séchage à l’air libre, suspendu en guirlandes appelées "txikitxurri". Dans la cuisine basque, le piment d’Espelette est partout : il relève les plats sans les dominer, apportant chaleur et parfum. On le trouve en poudre dans le fameux piperade, on l’incorpore aux marinades, aux soupes, aux fromages, et même dans certains desserts comme le chocolat au piment, mariage audacieux de douceur et de piquant. Ce qui rend ce piment encore plus exceptionnel, c’est que seules une dizaine d’exploitations environ sont officiellement reconnues et engagées dans la culture AOP, garantissant une production de qualité, souvent artisanale et familiale. Ce nombre limité assure un suivi rigoureux des méthodes de culture, ainsi qu’un respect profond des traditions, faisant du piment d’Espelette un produit rare et précieux.
L’après-midi, cap sur Saint-Jean-Pied-de-Port, petite cité médiévale posée au pied des Pyrénées, à la frontière espagnole. Dès l’arrivée, l’ambiance change : les ruelles pavées, les maisons à colombages et les remparts anciens racontent une histoire riche, mêlée de pèlerinages, de commerce et de traditions.
Se perdre dans les rues étroites, c’est comme remonter le temps. Le bruit des pas sur les pavés, les volets colorés, les petites places ombragées… Tout invite à la flânerie. La montée vers la citadelle offre un panorama splendide sur la vallée, entre montagnes et toits rouges.
Saint-Jean est aussi une étape incontournable pour les pèlerins sur le chemin de Compostelle, un lieu chargé d’émotions et de rencontres. Les artisans locaux, les boutiques de produits basques et les cafés invitent à prendre son temps, à goûter à la douceur de vivre basque.
Une pause bien méritée, entre patrimoine, nature et culture, pour savourer l’après-midi.
En flânant dans les ruelles de Saint-Jean-Pied-de-Port, impossible de ne pas penser à ces chaussures simples mais emblématiques : les espadrilles. Autrefois fabriquées localement à la main, ces chaussures en toile et corde de jute étaient un véritable artisanat traditionnel basque. Jusqu’au milieu du XXᵉ siècle, de nombreuses petites manufactures et ateliers familiaux animaient la ville, fournissant des espadrilles solides et colorées, parfaites pour le travail dans les champs comme pour la vie quotidienne. Chaque paire était un petit chef-d’œuvre, mêlant savoir-faire, robustesse et élégance rustique. Aujourd’hui, même si la production locale s’est largement réduite, l’espadrille reste un symbole fort de la région, portée avec fierté et vendue dans les boutiques touristiques comme un souvenir authentique du Pays basque. Aujourd’hui, plusieurs marques prestigieuses continuent de faire vivre cette tradition avec passion et savoir-faire. Parmi elles, Castañer, fondée en 1927, est sans doute la plus célèbre, alliant élégance et confort tout en respectant les méthodes artisanales. Autre incontournable, La Espadrille, qui fabrique des modèles à la main, souvent colorés et typiques, prisés tant par les locaux que par les visiteurs du monde entier. Ces maisons contribuent à maintenir l’espadrille comme un symbole vivant du Pays basque, mélangeant héritage historique et tendances contemporaines.
Après cette après-midi riche en découvertes à Saint-Jean-Pied-de-Port, retour à l’Hôtel Trinquet Mendionde. Le moment est idéal pour savourer un dîner typique à base de morue accompagnée de riz, un plat simple mais réconfortant, qui rappelle l’importance des produits de la mer dans la cuisine locale.
La soirée s’achève calmement, dans le silence doux de la campagne basque. Une nuit paisible avant de reprendre la route.
Le lendemain matin, un petit-déjeuner copieux et convivial donne des forces pour repartir à l’aventure, prêt à découvrir la suite du Pays basque avec curiosité et énergie.
Cap sur Bayonne, ville d’histoire au charme authentique, où la culture basque s’exprime à chaque coin de rue. Dès les premiers pas dans le centre, on ressent ce mélange unique entre architecture médiévale et influences maritimes. Les ruelles pavées invitent à la balade, avec leurs maisons à colombages colorées, leurs balcons fleuris et leurs petites places animées. Impossible de passer à côté des halles de Bayonne, véritables temples gourmands où l’on déguste avec plaisir une sélection de charcuteries basques : jambon de Bayonne, saucisson, pâtés maison… autant de saveurs intenses qui racontent l’histoire d’un terroir généreux. À l’heure du déjeuner, direction une cidrerie traditionnelle, une "sagardotegi" comme on dit ici. L’ambiance y est simple et conviviale, les grandes tables en bois accueillent des groupes venus partager un bon repas arrosé de cidre basque à volonté, tiré directement des tonneaux. Au menu : omelette à la morue, côte de bœuf, fromage de brebis et confiture de cerises noires — un vrai festin dans la pure tradition basque.
Les Fêtes de Bayonne, qui se déroulent chaque année fin juillet, sont célèbres pour leur ambiance festive et leurs événements spectaculaires. Parmi les moments les plus mémorables, on trouve les flash mobs géants qui rassemblent des milliers de participants dans les rues de la ville. Ces flash mobs sont des danses improvisées organisées via les réseaux sociaux, où les participants se retrouvent soudainement pour exécuter une chorégraphie commune. L'un des plus emblématiques a eu lieu en 2010, où plus de 2 000 personnes ont dansé sur le tube des Black Eyed Peas, "I Gotta Feeling", sur la place de la Liberté. Les participants, vêtus de blanc avec des foulards rouges, ont créé une mer de danseurs synchronisés, incarnant l'esprit joyeux et communautaire des fêtes. Ces événements sont devenus une tradition incontournable des Fêtes de Bayonne, attirant aussi bien les locaux que les visiteurs, et illustrent parfaitement l'énergie et la convivialité qui caractérisent cette célébration basque.
Après le déjeuner bien arrosé de cidre, direction la côte pour découvrir Biarritz, véritable joyau du littoral basque. Dès l’arrivée, on perçoit cette ambiance unique, mélange de raffinement balnéaire et de nonchalance chic. Station de villégiature prisée depuis le XIXe siècle, Biarritz fut d’abord l’un des repaires favoris de l’impératrice Eugénie, avant de devenir une destination internationale, fréquentée par les têtes couronnées, les artistes, les écrivains… et plus tard, les surfeurs du monde entier.
Les boutiques de luxe, les palaces historiques comme l’Hôtel du Palais, les spas haut de gamme et les restaurants étoilés témoignent encore aujourd’hui de cet héritage élégant. On se promène dans un décor de cartes postales, entre bâtiments Belle Époque, villas art déco et balcons fleuris tournés vers l’océan.
La balade nous mène naturellement jusqu’au Rocher de la Vierge, emblème de la ville, avec ses vues spectaculaires sur le large. En chemin, on croise les terrasses animées, les galeries d’art contemporain et les visiteurs venus flâner, cocktail à la main ou lunettes de soleil vissées sur le nez. Ici, tout est douceur de vivre et art de recevoir à la basque, avec ce petit supplément d’âme qui rend Biarritz à la fois sophistiquée et profondément attachante.
On dit même que l’air marin de Biarritz est l’un des plus riches en iode au monde, idéal pour recharger les batteries en profondeur.
Avant de rentrer à l’hôtel, une halte s’impose à Arcangues, petit village perché, à quelques kilomètres seulement de Biarritz. C’est un endroit hors du temps, où l’on ressent immédiatement le charme discret du Pays basque intérieur, loin du tumulte de la côte. Les volets rouges, les colombages blancs, le calme de la place centrale : ici, tout invite à la contemplation. On visite l’église Saint-Jean-Baptiste, posée en haut du village, et son cimetière attenant, célèbre pour abriter la tombe de Luis Mariano, le célèbre chanteur lyrique, idole des années 50.
Un lieu simple, presque secret, mais empreint d’émotion.
La balade se termine par une vue imprenable sur les montagnes basques au loin, avant de reprendre la route vers Saint-Pée-sur-Nivelle. La lumière du soir adoucit les paysages, et la route offre encore quelques panoramas superbes sur les collines basques. Au dîner, on savoure un authentique poulet basquaise, mijoté avec des poivrons, tomates, oignons et épices locales. Un plat généreux et réconfortant, parfait pour clore la journée dans la chaleur de la tradition culinaire basque.
Après un petit déjeuner frugal, mais toujours agréable dans le calme basque, on prend la route direction Saint-Jean-de-Luz, nichée au fond d'une baie paisible, à deux pas de l’Espagne. Dès les premiers pas dans les ruelles pavées, on est séduit par l’élégance discrète de cette ancienne ville corsaire, qui fut aussi le théâtre du mariage de Louis XIV avec l’infante Marie-Thérèse. L’église Saint-Jean-Baptiste, où fut célébrée l’union royale, impressionne par son intérieur riche en bois sculpté et ses galeries superposées typiquement basques. La promenade se poursuit le long du port, bordé de maisons colorées, et jusque sur la plage où les familles et les promeneurs flânent au rythme des vagues. Entre les échoppes d’artisans, les pâtisseries aux effluves sucrées et les petites galeries d’art, tout ici respire la douceur de vivre basque, dans sa version la plus élégante et balnéaire.
En fin de matinée, impossible de résister à une pause sucrée chez la célèbre Maison Adam, véritable institution luzienne depuis 1660. C’est ici même, selon la tradition, que furent offerts des macarons à Louis XIV lors de son mariage, et le secret de la recette est précieusement gardé depuis.
Ces macarons basques, bien différents de ceux de Paris, sont moelleux, parfumés, et sans ganache : un pur concentré d’amandes, de sucre et d’histoire. Difficile de n’en goûter qu’un seul ! La boutique, élégante et animée, ajoute au charme de cette halte gourmande, parfaite conclusion à une matinée déjà riche en découvertes.
Déjeuner à "Le Kaïku", un restaurant étoilé au Guide Michelin. Situé au 17 rue de la République, à seulement quelques pas de la célèbre pâtisserie, Le Kaïku est installé dans l'une des plus anciennes maisons de la ville, offrant un cadre chargé d'histoire et de charme. Le chef Nicolas Borombo y propose une cuisine d'auteur inventive, mettant en valeur les produits locaux avec créativité et finesse. La carte, inspirée des traditions basques et des saveurs de l'Atlantique, évolue au fil des saisons, offrant une expérience culinaire raffinée et authentique. Pour une expérience gastronomique exceptionnelle à Saint-Jean-de-Luz, Le Kaïku est une adresse incontournable. Comptez 100€ le Menu, sans le vin.
L’après-midi, cap sur Hendaye, dernier bastion français avant l’Espagne. Cette ville balnéaire, plus calme et moins touristique que ses voisines, séduit par sa grande plage de sable fin qui s’étire paisiblement face à l’océan. On flâne le long de la promenade, on respire l’air iodé, et on profite de la vue sur la baie, où les surfeurs débutants prennent leurs premières vagues. La forteresse d’Hendaye, vieille sentinelle surplombant la mer, mérite un détour pour son architecture et ses jardins. Une petite pause glace en terrasse avant de reprendre la route vers l’hôtel.
Après ces derniers instants de douceur basque, retour à l’hôtel Le Trinquet Mendionde pour un dîner léger et une nuit réparatrice. Le lendemain, route pour aéroport Marseille, vol pour Bastia, fin du périple.
Ce voyage au Pays Basque fut bien plus qu’une simple escapade : une véritable immersion dans un territoire où chaque paysage raconte une histoire, où chaque saveur révèle une tradition, et où chaque rencontre laisse une trace profonde. Entre les ruelles chargées d’histoire, les montagnes majestueuses, l’océan indomptable, et les visages accueillants, c’est un morceau d’âme basque que j’ai eu la chance de découvrir.
Au fil des étapes, j’ai compris que ce n’est pas seulement un lieu qu’on visite, mais une culture qu’on ressent, un art de vivre qu’on embrasse, avec ses passions, ses rythmes et ses émotions. Ce voyage m’a offert des instants de joie simple, des émerveillements sincères et des souvenirs qui réchauffent le cœur bien longtemps après le retour.
Je repars avec la conviction qu’il faudra revenir, encore et encore, pour écouter les murmures du vent sur les collines, pour retrouver le goût du piment d’Espelette, pour marcher sur les pas des anciens et pour continuer à tisser ce lien intime avec ce pays si riche, si vivant, si vibrant.
Le Pays Basque, c’est une promesse d’évasion et d’authenticité, un cadeau que l’on se fait à soi-même, et qui, à jamais, devient une part de soi.
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